LIGUE DES DROITS DE L’HOMME
COMMUNIQUE DE PRESSE - 6 JUILLET 2011
Demandeurs d’asiles victimes de coalition de fonctionnaire:
laisser la justice faire son travail
La Ligue des droits de l’Homme souhaite apporter quelques précisions factuelles et contextuelles sur les raisons qui l’ont incitée à porter plainte devant l’auditeur du travail contre le CPAS de Bruxelles.
Dès l’été 2009, Fedasil, agence fédérale, se voit obligée de refuser d’octroyer des places faute de moyens suffisants : la « crise de l’accueil » débute. Les centres d’accueils ouverts étant saturés, Fedasil a renvoyé les centaines de demandeurs d’asile à la rue vers les au CPAS. Le CPAS, en l’occurrence celui de Bruxelles, est en effet compétent en la matière et doit prendre en charge la tâche qui incombe en première ligne à Fedasil si celui n’a plus de places d’accueil.
Or, le CPAS de Bruxelles a refusé systématiquement de prendre en charge, même dans les moments les plus dramatiques de la crise de l’accueil, lors des grands froids, tant les demandes d'aide sociale des demandeurs d'asile à la rue, que les demandes d'aide médicale urgente de famille avec enfants mineurs en séjour illégal.
A cette situation vient s’ajouter un élément particulièrement grave aux yeux de la LDH : le refus d’acter ces demandes. En d’autres termes, en plus de refuser d’accorder son aide aux demandeurs d’asile, le CPAS de Bruxelles refusait également de leur délivrer un accusé de réception qui prouverait qu’ils avaient bien demandé cette aide. Sans cet accusé de réception, impossible pour les demandeurs d’asile ou les familles en séjour illégal susmentionnées de l’utiliser comme preuve devant un tribunal pour faire valoir leurs droits.
Des notes internes très "embarrassantes" du CPAS de Bruxelles Ville des 29 avril 2009, 14 mai 2009 et décembre 2010 (doc. annexés) dont la LDH a pris connaissance par voie de presse, attestent de cette méthode. Ces notes internes donnent notamment injonction aux chefs d’antenne et responsables des services transversaux de ne plus prendre en considération les demandes d’aide émanant des familles en séjour illégal avec enfants mineurs. Or, en agissant de la sorte, le CPAS de Bruxelles prive les individus d’un droit qui leur est consacré « en se prévalant d’une pratique de désobéissance systématique à la loi qui s’apparente à de la coalition de fonctionnaire et paraît pouvoir tomber sous le coup de l’article 233 du Code pénal » (selon les termes repris d’un jugement du Tribunal du travail de Bruxelles du 25 octobre 2010 (n°RG 11357/10).
Dans ce contexte, et sur base des éléments en sa disposition, la LDH a donc décidé de se joindre le 19 mai 2011 à la plainte déposée, devant l’auditorat du travail, par 5 personnes victimes.
Il est à cet égard important ici de préciser que la plainte ne vise évidemment ni le personnel, ni les assistants sociaux des CPAS qui s’acquittent le plus souvent de leur travail difficile de manière formidable, mais bien la décision prise par le conseil de violer délibérément la loi et de condamner, dès lors, des personnes à des conditions de vie scandaleuses (vie dans la rue, refus de prise en charge de soins médicaux urgents…).
La LDH a soutenu et continue à soutenir les familles qui ont déposé une plainte chez l'Auditeur du Travail, qui envisage de poursuivre son enquête. La LDH attend désormais que la Justice suive son cours… et se réserve par ailleurs le droit d’entamer une action en justice à l’encontre de l’agence fédérale Fedasil pour sa responsabilité dans la crise de l’accueil.